Franck Cammas & Charles Caudrelier / Gitana Team

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Thomas Coville / Sodebo

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Yann Guichard / Spindrift Racing

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Yann Guichard / Spindrift Racing

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Francis Joyon / Idec-Sport

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Francis Joyon / Idec-Sport

 

Moins d’un mois après une tentative avortée au bout d’une semaine de navigation en raison d’un Pot au Noir coriace, Francis Joyon, Bernard Stamm, Alex Pella, Gwénolé Gahinet, Clément Surtel et Sébastien Audigane ont franchi la ligne de départ, à Ouessant, le 16 décembre à 9h19. Et la motivation était totale. « On est têtu, l’objectif reste le même : être de retour en moins de 45 jours, a confié Francis Joyon avant d’embarquer. On n’est pas des mathématiciens, il est toujours difficile de parler en pourcentages pour ce genre d’aventure. Mais on a une chance, c’est déjà beaucoup, et on est là pour la saisir ! »

©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport
©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport

 

Bon tempo dans l’Atlantique

Les six marins ont rapidement pris leurs marques à bord du maxi-trimaran Idec Sport tandis que les conditions météorologiques leur ont permis d’avancer bon train. Résultat : les Canaries ont été en vue après 48 heures de mer. Si, par la suite, le Pot au Noir a forcé la Team Joyon à ralentir un peu la cadence, l’Equateur a été atteint au bout de 5 jours, 18 heures et 59 minutes. Un temps qualifié de « correct » par Joyon qui reste ainsi « dans les roues » du détenteur du Trophée, à savoir Loïck Peyron. Avec la bascule dans l’hémisphère sud, les cirés ont été temporairement remisés dans les sacs. Les alizés et le soleil ont fait leur apparition pour le plus grand plaisir des six hommes.

A l’aube du 11ème jour, l’équipage d’Idec Sport a rejoint les Quarantièmes et c’est à une moyenne de plus de 30 nœuds que s’est effectuée la descente vers le Cap de Bonne Espérance. La chasse aux milles s’est donc intensifiée et, le 29 décembre, au cœur de la nuit, le maxi-trimaran rouge et gris a doublé la première des trois grandes marques géographiques jalonnant sa chasse au Trophée Jules Verne. Au cours des 24 heures suivant le passage du Cap de Bonne Espérance, Francis Joyon et ses cinq acolytes ont avalé pas moins de 872 milles, signant sans le savoir à ce moment là la meilleure journée de leur périple autour du monde.

©Mer et Média / Idec Sport
©Mer et Média / Idec Sport

C’est donc pied au plancher qu’Idec Sport a fait son entrée dans l’Océan Indien. Et les six marins n’ont alors pas eu de cesse de revenir sur le record détenu depuis 2012 par Loïck Peyron. Poussés par des vents portants, l’équipage a joué la carte de l’efficacité. En guise de cadeau pour la nouvelle année, la team Joyon a vu ses efforts récompensés : dans la nuit du réveillon, elle a virtuellement dépassé Loïck Peyron et ses 13 hommes du maxi-trimaran Banque Populaire V.

Sprint austral

Le froid du Grand Sud a obligé les hommes à sortir les cagoules en néoprène et les fêtes de fin d’année se sont déroulées sous le signe du labeur. Mais le moral est resté bon. « Dehors, tout est uniformément gris et monotone depuis près d’une semaine, a raconté Clément Surtel. Mais tenir de telles vitesses jour après jour provoque une incroyable stimulation ». Et Francis Joyon d’ajouter : « Le choix du petit mât, et de la légèreté induise par notre équipage réduit, font des merveilles dans le sud, dans du vent fort bien orienté sur l’arrière du bateau ».

Le 2 janvier, Idec Sport a rallié le Cap Leeuwin, au sud-ouest de l’Australie, débutant ainsi une jolie série de records. Avec un passage à Leeuwin en 17 jours, 06 heures et 59 minutes, Joyon et sa bande ont en effet effacé de plus de 16 heures la performance de Peyron. Galvanisés par cette belle performance, les six hommes ont enchaîné à peine deux jours plus tard avec un nouveau record intermédiaire entre Leeuwin et la Tasmanie : 18 jours, 18 heures et 31 minutes, balayant ainsi le record établi l’année précédente par le maxi-trimaran Spindrift 2 de Yann Guichard et Dona Bertarelli.

A l’assaut du Cap Horn

Après l’Océan Indien, place au Pacifique. « Le casque ou la cagoule en néoprène ont été remplacés par les lunettes de soleil et le simple bonnet, a alors confié Sébastien Audigane dans son carnet de bord. Ça fait du bien de souffler un peu, la route est encore longue pour le Horn ». Le Horn, comme l’appelle presque intimement ceux qui l’ont déjà cotoyé, ce rocher noir marquant la fin du Pacifique, est toujours un moment crucial d’une circumnavigation. Ce monument du monde de la navigation fascine et à la fois effraie. Mais son passage est le synonyme du retour tant attendu dans l’Atlantique.

©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport
©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport

Le 12 janvier, après 26 jours, 15 heures, 45 minutes de mer et avec 4 jours 06 heures et 35 minutes d’avance sur le temps de référence de Banque Populaire V, le Horn est franchi par l’équipage d’Idec Sport. Ce dernier a alors signé son quatrième record intermédiaire avec celui de l’océan Pacifique entre la pointe sud-est de la Tasmanie et le Cap Horn (07 jours 21 heures et 14 minutes). La joie est grande à bord du bolide des mers.

Cap au nord

La remontée le long des côtes brésiliennes s’est déroulé sans trop d’encombres. Dans la foulée, le Pot au Noir a été bien négocié par les six marins qui ont choisi d’effectuer une vaste manœuvre de contournement pour ne pas se retrouver englués. Si le trajet s’est logiquement un peu allongé à la faveur de cette stratégie mise en place par le routeur de génie Marcel van Triest, cette dernière s’est révélée payante. Le 20 janvier, Joyon, Audigane, Surtel, Gahinet, Pella et Stamm ont de nouveau dépassé l’Equateur. 35 jours, 04 heures et 09 minutes, le chrono est ahurissant ! Les six marins ont amélioré de 2 jours, 22 heures et 36 minutes le précédent record détenu depuis 2012 par Loïck Peyron.

©Mer et Média / Idec Sport
©Mer et Média / Idec Sport

Mais pas le temps de se congratuler ! Le regard est désormais tourné vers les côtes bretonnes où la perspective d’un record est de plus en plus grande. « On commence à parler un peu de l’arrivée », a confié Gwénolé Gahinet le 23 janvier. « Sous un ciel mi étoilé et poussé par des vents de sud nerveux Idec Sport dévale les pentes au large de Lisbonne, raconte pour sa part Sébastien Audigane deux jours plus tard. Une dernière ligne droite en direction des côtes finistériennes, le vent devrait refuser dans le golfe de Gascogne. La dernière nuit risque d’être sportive et humide au reaching ».

Et à l’arrivée, le Trophée

Sébastien Audigane ne s’est pas trompé. La dernière nuit a été sportive pour l’équipage qui a tout donné pour boucler son tour du monde en … moins de 41 jours. Le 26 janvier à 8h49, le maxi-trimaran rouge et gris s’est adjugé le Trophée Jules Verne après 40 jours, 23 heures, 30 minutes et 30 secondes passés en mer. Le tout à une moyenne de 22,84 nœuds et avec – en bonus – 6 record intermédiaires.

©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport
©Jean-Marie Liot / DPPI / IDEC Sport

La performance est incroyable et la joie se lit sur les traits fatigués des six marins accueillis en véritable héros à Brest par leurs amis, leurs familles et les nombreux badauds ayant bravé le froid breton de ce petit matin de janvier.

 

Isabelle Trancoen 

Francis Joyon / Idec-Sport

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

 
Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.
 
Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.
 
À bientôt !

Yann Guichard & Dona Bertarelli / Spindrift 2

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.

Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.

À bientôt !

Loïck Peyron / Banque Populaire V

Le plus grand trimaran océanique du monde défie l’espace et le temps. Loïck Peyron et treize marins de haut vol ont lancé la machine Banque Populaire V à l’assaut du mythique Trophée Jules Verne. Toujours en avance sur le record à battre, le maxi abat les obstacles, déjoue les pièges et force sa chance pour faire exploser le chrono.

Le 22 novembre, à 9 heures, 31 minutes et 42 secondes, une fusée bleue fonce au portant, au large de l’île bretonne d’Ouessant(1)(1)Victoire autour du monde, Marie Le Berrigaud-Perochon, éditions Mer et Découverte, 2012.. La ligne de départ du Trophée Jules Verne vient d’être franchie par le plus grand trimaran océanique du monde. Avec ses 40 mètres de long, 13 mètres de large, 450 m2 de grand-voile, le maxi Banque Populaire V (« BPV ») affiche 30 nœuds de moyenne dès le départ de sa course et promet de toucher l’équateur en moins de six jours.

À son bord, le skipper Loïck Peyron, qui a pris le commandement du navire au pied levé(2)(2)Le maxi Banque Populaire V est un prototype imaginé dès 2006 par le skipper Pascal Bidégorry et son sponsor, qui ont confié sa conception aux architectes du cabinet VPLP. Dès la mise à l’eau du navire en 2008, Pascal Bidégorry et son équipage ont multiplié les défis et empilé les records. Suite à un désaccord entre le sponsor et le skipper basque, le groupe Banque Populaire a désigné Loïck Peyron à la barre du maxi pour une seconde tentative à l’assaut du Trophée Jules Verne. Pour en savoir plus : www.voile.banquepopulaire.fr ©Photo Yvan zedda / BFBP ©Photo Yvan zedda / BFBP Pascal Bidégorry sur le chantier de BPV ©Photo Yvan Zedda / BFBP, et treize marins du « Team Banque Populaire » : Thierry Chabagny, Florent Chastel, Thierry Duprey du Vorsent, Kevin Escoffier, Emmanuel Le Borgne, Frédéric Le Peutrec, Jean-Baptiste Le Vaillant, Ronan Lucas, Pierre-Yves Moreau, Yvan Ravussin, Xavier Revil, Brian Thompson et Juan Vila.

Pour moitié, ces équipiers sont des régatiers adeptes de la grande vitesse et des montées d’adrénaline qu’elle procure. Loïck Peyron devra tempérer leur fougue et imposer, avec toute l’expérience du cap hornier, un principe qui a toujours guidé les challengers du Trophée : avant tout, ramener le bateau et les hommes !

© Photo Benoit Stichelbaut / BFPD © Photo Benoit Stichelbaut / BFBP

Freiner la machine

Les multirécidivistes(3)(3)Loïck Peyron, Frédéric Le Peutrec, Florent Chastel, Brian Thompson, Juan Vila et Thierry Duprey de Vorsent. du bord le savent, pour gagner il faut arriver. Or le tour du monde par les trois caps est une course d’endurance autant que de vitesse, jalonnée de pièges météo. Les treize hommes de Peyron devront apprendre à ralentir leur monture afin de ménager le matériel.

Depuis les Baléares, Marcel van Triest, le routeur à terre dessinera avec eux la meilleure route possible, pour boucler ce parcours en un temps record. Le temps de référence à battre est celui établi par Franck Cammas, détenteur du Trophée Jule Verne à bord de Groupama 3, en 2010 : 48 jours, 7 heures, 44 minutes et 52 secondes.

Après une première nuit sportive, dans une mer chaotique au large du Portugal, BPV fait route directe jusqu’aux Canaries. La vitesse moyenne du bateau oscille alors entre 27 et 29 nœuds.

Loïck Peyron décide soudain d’infléchir à 90° sa trajectoire vers le sud. Cap à l’ouest pour accrocher une rotation du vent à l’est et un meilleur angle pour la descente. Pendant quelques heures, le trimaran cesse d’engranger les milles, mais la stratégie est payante.

© Photo Benoit Stichelbaut / BFBP Loïck Peyron et Juan Vila © Photo Benoit Stichelbaut / BFBP

L’équateur à pas de géant

Au quatrième jour de navigation, 666 milles (1071 km) ont été parcourus en 24 heures. BPV cavale sous 20 nœuds (37 km/h) de nord-est, dans des alizés réguliers et sur une mer plate. À bord, le rythme est intense. Il faut sans cesse réduire ou renvoyer de la toile, essayer de contenir la « machine » sans pour autant freiner son élan. « On a changé un peu de cap, on a changé le point de passage du Pot au noir. Les gourous des nuages nous ont trouvé un petit trou où aller se faufiler, raconte Florent Chastel via radio, là on est grand-voile haute, solent, entre 100-110° du vent avec une vingtaine de nœuds de vent, et on avance à 32-33 nœuds. La mer est plutôt plate, ça tape pas, c’est super agréable. On tient des moyennes hallucinantes.»

Pas de répit pour les 14 hommes de BPV. Le pot au noir – cette zone alternant calmes plats et grains violents aux abords de l’équateur – est plus étendu que prévu et tumultueux. À la vacation radio du 27 novembre, Loïck Peyron évoque des bonds de 18 à 32 nœuds en quelques secondes(4)(4)Pour des retranscriptions détaillées des vacations radio : www.fralo.info. « C’est un pot au noir très actif qu’on subit maintenant depuis près de 24 heures, un petit peu long, un petit peu usant. On a hâte d’en sortir rapidement. » (5)(5)Vacation radio du 27 novembre avec Loïck Peyron

BPV ne devance son concurrent virtuel que de 60 milles (96 km) à la sortie du phénomène. Et, le dimanche 27 novembre 2011 à 23 heures, 26 minutes et 52 secondes (GMT), Loïck Peyron ne vole que 28 minutes et une seconde à Franck Cammas au franchissement de l’équateur… Le maxi trimaran rafle ainsi son premier record sur le parcours du Jules Verne : Ouessant-Équateur en 5 jours, 14 heures, 55 minutes et 10 secondes.

Indécent !

Prochain obstacle : l’anticyclone de Sainte Hélène, une zone de calme en travers de l’Atlantique sud. Les conditions de contournement sont bonnes, prédit le routeur à terre, Marcel Van Triest. Le Team Banque Populaire trace une ample courbe pour esquiver le phénomène par sa bordure sud ouest puis sud. Le détour est obligatoire mais la vitesse du bateau ne fléchit pas et la distance se creuse entre BPV et son concurrent virtuel.

Par 43°Sud, le 2 décembre, la température de l’air et de l’eau dégringole, le vent forcit à 35 nœuds (64 km/h). Sous grand-voile à deux ris et trinquette, le maxi trimaran bridé par ses pilotes navigue avec 955 milles (1536 km) d’avance sur le temps de référence.

Photo du bord / © BFBP Photo du bord / © BFBP

Dès le 4 décembre, les 14 marins mettent le Cap de Bonne Espérance dans leur sillage après 11 jours, 21 heures, 48 minutes et 18 secondes(6)(6)Le record absolu entre Ouessant et le Cap de Bonne Espérance était jusqu’alors de 13 jours, 6 heures et 1 minute. Peyron améliore le chrono arrêté par Cammas en 2010, de 2 jours 15 heures, 43 minutes et 25 secondes.. Un nouveau record inscrit au tableau du maxi ! « 11 jours et 21 heures, c’est indécent, commente Loïck Peyron à la vacation radio du jour, il y a quelques dizaines d’années, 12 jours, c’était le temps mis par Charlie Barr pour traverser l’Atlantique. Tabarly est le premier à avoir fait un peu moins de 12 jours, pour l’Atlantique, il y a 20 ans à peine. »

Indien express

Entré dans l’océan Indien, le Maxi Banque Populaire V pointe ses étraves vers les îles Kerguelen. Poussé par un vent de secteur nord-ouest, le trimaran géant fait face à une mer creusée qui oblige encore les marins à ralentir. À bord, la consigne est stricte : on ne dépasse pas les 30 nœuds !
La prudence est de mise par 48° Sud, car la visibilité est réduite et l’on signale un champ d’icebergs à l’est des Kerguelen, une centaine de glaçons de plusieurs kilomètres de long au-dessous du 50ème parallèle Sud.

Le 6 décembre, malgré un ralentissement relatif, l’équipage vient d’abattre 800 milles (1287 km) en 24 heures « C’est juste la troisième fois qu’un bateau atteint des moyennes de 800 milles par jour, se réjouit Kévin Escoffier, ingénieur et responsable du bureau d’étude au sein du Team Banque Populaire, et ce qui est particulièrement impressionnant, c’est que ça se passe à l’échelle d’un tour du monde. » Seuls Groupama 3 et Banque Populaire V avaient dépassé ce seuil, à l’occasion du record de la traversée de l’Atlantique Nord, en 2009.

Après seulement 15 jours de navigation, avec 1933 milles (3110 km) d’avance sur le détenteur du record, l’équipage de BPV double les Kerguelen par le sud et s’apprête à remonter vers le nord pour contourner la glace et filer vers le cap Leeuwin, prochain point de passage obligé du parcours.
L’Australie dans le viseur, le trimaran bleu rattrape une dépression qui lui permet de continuer à bénéficier d’un flux soutenu d’ouest.

Le 10 décembre, le skipper de BPV et ses hommes empochent un nouveau temps de référence : après 17 jours 23 heures 57 minutes et 18 secondes depuis Ouessant, ils doublent le premier cap australien et font bientôt leur entrée dans le Pacifique avec 3 jours 14 heures et 24 minutes d’avance sur le détenteur du Trophée Jules Verne.

Photo du bord / © BFBP Xavier Revil, Pierre Yves Moreau et Thierry Chabagny. Photo du bord / © BFBP

Marmite Pacifique

Le maxi trimaran entame à fond de train sa traversée de l’océan le plus vaste du monde. 48 nœuds de chute libre dans un creux de vague au petit matin du 12 décembre concluent une première nuit chaotique. La houle s’allonge et la mer devient bientôt plus maniable.(7)(7)Vacation radio du 12 décembre avec Loïck Peyron

Mais le plaisir de glisse est de courte durée. Dès le 15 décembre, un front en provenance du Nord de la Nouvelle-Zélande abat 40 nœuds (74 km/h) de vent en travers de Banque Populaire V et envoie une mer hachée sous ses flotteurs. Huit heures durant, la grand-voile est réduite à son strict minimum et aplatie au maximum, pour ne plus servir qu’à stabiliser le bateau.
Marcel van Triest, routeur à terre, ne prévoit rien d’enthousiasmant à l’issue de cette tempête : un champ de glace en perspective contraint BPV à se détourer au nord où il tombera dans la pétole. Le confortable matelas de 1882 milles (3028 km) d’avance sur le détenteur du record sera réduit de moitié jusqu’au cap Horn.

Le 16 décembre, l’iceberg que cherchait à éviter Loïck Peyron est en vue. « B15J » – c’est le nom que lui ont donné les savants – mesure 20 kilomètres de long et traîne dans son sillage des blocs non moins dangereux. La veille s’organise. « Le moindre petit morceau de glace, non repérable au radar et pas visible de nuit, peut fracasser une coque, ou deux, ou trois, d’un coup, souligne le skipper, ceux qui dorment sont les pieds vers l’avant car il vaut mieux se fracasser les chevilles que la nuque, en cas de choc. On avance à 15 nœuds environ, le plus doucement possible, dans la direction de la sortie de cette zone très dangereuse. » (8)(8)Vacation radio du 17 décembre avec Loïck Peyron

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TJV_COURSES_BANQUE POPULAIRE_13 Une vue satellite de l’iceberg B15J. Le même, vu depuis Banque Populaire V, le 16 décembre 2011. © BFBP

Englué dans l’anticyclone qui l’attendait, BPV met encore six jours à s’extirper du Pacifique. Le 21 décembre, le cap mythique est enfin à portée d’étraves. « J’ai un petit dilemme en ce moment, parce que passer tout près du Horn, à la demande de la moitié de l’équipage qui ne l’a jamais vu, ce serait exaucer des vœux très sympas, mais en revanche, ça risque d’être dans 35-40 nœuds (74 km/h) de vent et je ne suis pas très chaud », prévient Loïck Peyron. Avec un peu plus de 600 milles (965 km) d’avance sur le temps de Groupama 3, contre 2000 (3218 km) quelques jours plus tôt, le skipper n’hésite pas longtemps.

Le 23 décembre, le trimaran Banque Populaire V dépasse la longitude de la pointe sud de l’Amérique, après 30 jours, 22 heures, 18 minutes et 48 secondes de navigation. Soit plus d’un jour de moins que Franck Cammas en 2010(9)(9)Le skipper n’améliore pas le record WSSRC de la traversée de l’océan Pacifique, de la pointe sud de la Tasmanie au cap Horn, qui reste la propriété de son frère Bruno Peyron, en 8 jours, 18 heures et 8 minutes. Ce record avait été établi, à bord du catamaran Orange II, en 2005.. Mais les petits bleus ne verront pas le caillou.

« Bonjour l’hémisphère nord ! »

Encore un petit effort vers l’est, à l’entrée dans l’Atlantique, pour accrocher un flux généré par une dépression centrée sur les Malouines, puis cap au nord, direction l’écurie ! Les effets bénéfiques de la dépression se dissipent à hauteur de l’Uruguay mais 900 milles (1448 km) puis 1000 milles (1609 km) d’avance repris sur le temps de référence permettent d’envisager avec sérénité une remontée à 15 nœuds… Au près.

Photo du bord / © BFBP Thierry Chabagny. Photo du bord / © BFBP

Le vent de nord-est aux abords des côtes du Brésil ne laisse d’autre choix aux hommes de BPV que cette allure si peu favorable à la performance. Cependant, cela n’a rien d’inhabituel sous ces latitudes et le trimaran bleu déboule tout de même dans l’hémisphère nord avec 3 jours, 18 heures et 24 minutes d’avance sur le record de Groupama 3 deux ans plus tôt. « Nous avons passé l’Equateur à grande vitesse. Nous sommes à 35 nœuds, sur une mer quasi plate, ce n’est que du bonheur, s’enthousiasme le skipper de BPV le 30 décembre, le bateau ne souffre pas, les bonhommes encore moins. Tout le monde est ravi, surtout les jeunes cap-horniers. Bonjour l’hémisphère Nord ! ».

Ultime détour

Il semble que sur ce tour, chaque épisode de félicité ait son revers. Aussitôt la latitude 0° dépassée, les 14 équipiers de BPV se font secouer par 34 nœuds (62 km/h) de vent et une mer très courte durant toute une nuit.

À l’aube de l’année 2012, BPV navigue dans de meilleures conditions à la latitude des Antilles. Mais, au nord, l’anticyclone des Açores a pris ses quartiers en travers de l’Atlantique, bloquant toute route directe vers la Bretagne. Peyron envisage un instant de couper la dorsale dans une mer casse-bateau mais la prudence l’emporte encore une fois. Plus que jamais, il faut ménager le matériel. De plus, le skipper sait que le record est à lui, gagner du temps serait pure gourmandise. « Fast but not furious », telle est la devise du bord.

C’est donc après un large contournement par l’ouest que les 14 équipiers peuvent enfin entrer dans la Manche via la mer d’Irlande. La fusée bleue dévale les derniers milles qui la séparent de la victoire à 35 nœuds de moyenne. La ligne d’arrivée est franchie le 6 janvier, à 22 heures (GMT), dans l’obscurité éclaboussée par les éclats du feu le plus puissant d’Europe, celui du phare d’Ouessant, le Créac’h.

Photo du bord / © BFBP Photo du bord / © BFBP

Les 14 équipiers de Banque Populaire V viennent de parcourir 29 002 milles (46674 km) à la vitesse moyenne de 26,51 nœuds, en 45 jours, 13 heures, 42 minutes et 53 secondes. Ils ont pulvérisé le record de vitesse autour du monde. Ils sont les nouveaux détenteurs du Trophée Jules Verne.

Quelques jours plus tôt, via radio, Loïck Peyron rendait un hommage discret mais appuyé au travail collectif qui le menait au record : « On sent qu’il y a eu du boulot sur le bateau, depuis trois ans, non seulement de conception mais aussi de navigation. Tout ce programme n’a certainement pas démarré quand je suis arrivé. » Et d’ajouter, avant même de voir Ouessant : « Au niveau technique, tout va progresser et il est évident que ce record sera probablement battu dans quelques années… » (10)(10)Vacation radio du 4 janvier avec Loïck Peyron

Le skipper ne savait pas encore que ses prochains challengers emprunteraient trois ans plus tard le même vaisseau que lui : un maxi trimaran de légende désormais paré de noir et or et rebaptisé Spindrift 2…

Pascal Bidégorry / Banque Populaire V

Les tentatives de record, à l’assaut du Trophée Jules Verne, sont autant d’aventures océaniques, qui méritent d’être racontées ici.

 
Graves avaries ou retards trop importants ont souvent stoppé des capitaines courageux dans leur élan. D’autres skippers sont parvenus à boucler leur tour… Seulement pas assez vite pour battre le record alors établi.
 
Ces performances, histoires d’hommes, de femmes et de bateaux, seront retranscrites dans ces pages.
 
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